Voyage spatiaux et biologie

BOURUMEAU William, GACEK Corentin, JAMET Camille, MISPOULET Romain, TELLIER Jérome, VINCENT Marine

         L’adaptation des êtres vivants dans l’espace hors du champ terrestre soumis à l‘apesanteur. La biologie spatiale est une discipline scientifique récente qui a pour objectif principal d’analyser les effets du milieu spatial sur les êtres vivants de notre planète. Ces effets peuvent être physiologiques, psychologiques ou biologiques. Depuis les années 50, l’homme tente de déchiffrer les mystères de l’univers en quête de réponses sur notre histoire et nos origines. Aujourd’hui, nous nous projetons sur d’autres planètes qui pourraient un jour remplacer la nôtre. Cependant, voyager dans ce nouvel environnement (l’espace) n’est pas sans risque. Quels seraient dès lors, les impacts de ces nouveaux milieux sur l’organisme des êtres vivants ?
         Notre article s’organise en trois parties. Avec la première partie nous observerons les impacts de ce nouvel environnement sur l’homme. La seconde partie traitera des végétaux. Et, pour finir nous analyserons l’évolution et le développement de microorganismes en conditions extrêmes à la frontière de l’espace.

         Lors des voyages spatiaux, les astronautes sont dans la plupart du temps en apesanteur. Cette condition entraîne malheureusement de nombreux désagréments physiologiques.
         Tout d’abord, la perte osseuse est l'une des plus graves conséquences observées chez les astronautes, elle constitue un frein important sur la durée d’une mission spatiale. Cette perte est due à plusieurs facteurs comme la durée du vol, l’alimentation appauvrie en calcium et vitamine D, mais également à une forte exposition aux rayons UV du soleil et autres radiations. Enfin, l’apesanteur ne permet pas de faire travailler les muscles et les os ce qui entraîne leur dégénérescence. On peut par exemple citer l’impact sur les muscles qui, n'étant plus autant stimulés que lors de la vie sur Terre, commencent à s'atrophier. Sur Terre, nous utilisons constamment certains muscles pour contrer les effets de la pesanteur. L'atrophie musculaire réduit l'habileté, la force, la locomotion et le maintien d'une posture correcte. Ils sont couramment appelés les muscles antigravifiques composés des gastrocnémiens (muscles des mollets), les quadriceps et les muscles du dos et du cou. Nos muscles s'affaiblissent et se détériorent lorsqu'on ne les utilise pas régulièrement ou qu'on ne fait pas suffisamment d'exercice. Ce processus s'appelle l'atrophie musculaire. Cette dernière est inévitable mais peut être réduite en faisant du sport sur Terre ou dans l’espace. Nous constatons aussi, la diminution du volume sanguin en apesanteur qui est également accompagnée par une diminution du nombre de globules rouges, une sorte d'anémie spatiale allant de 10 à 15 % de globules rouges en moins et ce, quelque soit la durée de la mission. En effet, le sang appauvri en liquide va se concentrer momentanément en hématite. Il est donc visqueux, épais, augmentant les risques de thrombose; heureusement l’organisme va réagir au bout de quelques semaines et produire moins de globules rouges. Après le retour sur Terre, il faut de 6 à 8 semaines pour retrouver une situation normale. Ce type d'anémie ne compromet pas la santé ou les performances d'un équipage. Mais associée à une diminution du volume sanguin, cette situation présente des risques dans le cas de blessures ou d'hémorragie pendant le vol.[1]Ensuite, dans l’espace, la défense de l’organisme est fortement affaibli, en effet le nombre de lymphocyte T est nettement en baisse et certaines fonctions sont aussi affectées, tel que la réactivité à une attaque de micro-organismes ou de virus. Cette diminution de lymphocytes engendre un risque élevé d’infection dû à la grande longévité des virus, champignons et bactéries en apesanteur. L’affaiblissement du système immunitaire n’est pas irréversible lors d’un voyage dans l’espace, car effectivement lors du retour sur Terre, le système immunitaire retrouve sa pleine capacité[1].

         L’homme n’est pas le seul être vivant capable de s’adapter aux conditions hostiles de l’espace. Grâce à l’avancée technologique, les chercheurs ont pu envoyer dans l’espace d’autres êtres vivants comme les végétaux que nous traiterons dans la partie suivante.

         Deux types de recherches sont en cours pour pouvoir cultiver des légumes dans l’espace. La première sur des légumes plantés sur Terre dans des sols provenant de l’espace et la seconde sur des légumes cultivés dans l’espace, dans un laboratoire spatial, mais dans des sols provenant de la terre.

         La première expérience consiste à planter des graines dans des échantillons de sols artificiels de la Lune et de Mars. Ces sols sont des substituts de sables lunaires et martiens réalisés par la Nasa en conformité avec les échantillons et analyses effectuées sur les deux planètes[2]. Les plantes qui ont été semées dans le sol martien ont germé[2] et les graines des plantes domestiques (cresson, seigle) se sont mieux développées que celles des plantes sauvages[2]. Contrairement au sol martien qui retient l’eau, le sol lunaire s'est avéré moins fertile. En analysant le sable lunaire, les chercheurs ont réalisé qu'il contient de l'aluminium, un poison pour les plantes, et possède un taux d'acidité trop élevé. Il faudrait donc trouver des plantes spécifiques qui n’absorberaient pas l'aluminium[2] si nous souhaitons utiliser le sol lunaire pour faire pousser des plantes. L’autre expérience baptisée Veg-01[2] fait partie d'une série d'expériences, dont l’objectif final est de permettre aux astronautes de cultiver des légumes dans l’espace sur des sols provenant de la planète Terre. Le Vegetable Production System [3] est un système de culture installé dans la Station spatiale internationale. Il s’agit de tester un nouveau type de serre spatiale à faible coût, dont l'encombrement s'adapte à la croissance des plantes. L'expérience a été utilisée notamment pour produire des laitues romaines rouges. Celles-ci, placées sous des LEDs  qui synthétisent la lumière solaire, se sont correctement[3]développées. L’avantage premier est l’absence de nuisibles. Cependant, les légumes doivent se contenter de lumière artificielle savamment calibrée [3]. L’agriculture spatiale permettrait aux astronautes une amélioration de leur alimentation par un apport supplémentaire de nutriments, vitamines etc., une augmentation de leur résistance aux radiations du soleil et enfin, elle favoriserait la bonne humeur d’un point de vue psychologique. De nos jours, les scientifiques sont parvenus à cultiver des salades et à créer des potagers dans l’espace. Cette agriculture spatiale soulève des questions sur l’adaptation des plantes à cet environnement particulier ou règne une microgravité.

         La microgravité se différencie de la pesanteur à la surface de la Terre. C'est, en pratique, l'état dans lequel se trouvent les corps situés à l'intérieur des vaisseaux spatiaux en mouvement orbital, où subsiste toujours une très faible pesanteur résiduelle[4] appelée microgravité.

         Sur Terre, les végétaux sont soumis depuis des millénaires à la gravité terrestre, leurs gènes impliqués dans le développement de la racine en sont un bon exemple. A partir du XVIIIième siècle, des chercheurs se penchent sur la relation entre la gravité et l’orientation des racines de végétaux. Ils ont remarqué que ces dernières s’orientaient vers le champ de gravité de la Terre. En effet, lorsqu’une graine en germination subissait une rotation, il y avait un changement de configuration des racines avec l’apparition d’une courbe spécifique à la rotation.
         Les cellules statocytes présentent dans la coiffe de la racine sont responsables de l’orientation de la racine dans le sens gravitationnelle[4]. Elles contiennent des éléments appelés amyloplastes[4] qui fonctionnent par sédimentation dans le cytoplasme. Lors d’une rotation d’une plantule cultivée dans l’espace,  les amyloplastes roulent pour corriger l’inclinaison de la racine. On parle de gravitropisme[4].

image du site http://planet-vie.ens.fr/article/1521/gravitropisme-vegetaux


         Une équipe de chercheurs du département de sciences biologiques à l’université de Montréal a montré que, dans l’espace, la sédimentation de la plante était insuffisante pour répondre à toutes les contraintes de l’espace. Pour le prouver, les chercheurs ont utilisé la technique de la microscopie de fluorescence[4] qui analyse en direct les modifications et les perturbations du trafics intracellulaires dans le développement de l’enveloppe cellulaire[4] de la plante. La plante spatiale est donc plus fragile que la plante terrestre, comme l’homme, elle s’adapte partiellement à l’espace.

         Parmi les études spatiales, celles sur la panspermie provoquent de nombreux débats. Cette théorie revendique que la vie terrestre proviendrait de microorganismes venus de l’espace. Ces êtres vivants seraient arrivés grâce aux crashs de comètes ou transportés par des poussières d’étoiles. Or, aucun organisme extraterrestre n’a été découvert jusque-là. Si cette théorie s’avère réelle alors, l’étude de ces organismes nous permettra de connaître leur méthode de survie et à terme de devenir une source d’inspiration dans les nouvelles technologiques tel que le bio-mimétisme (industrie qui s’inspire des richesses de la nature pour les transposer à des fins technologiques).

         En 2011, une mission en ballon-sonde, fut organisée afin de réaliser des prélèvements d’air à très haute altitude[5]. Son but : trouver des microorganismes vivants dans des conditions semblables à celle de l’espace. Les chercheurs ont identifié des bactéries avec un métabolisme similaire à celles de la Terre. Cependant, leur capacité d'adaptation n’a pu être analysée en raison de leur sensibilité. Toujours étant que leur présence en si haute altitude n’a pas été expliquée. Deux théories sont proposées : l’une propose qu’elles soient acheminées depuis la Terre, l’autre suggère qu’elles arrivent depuis l’espace. La remise en suspension à partir de germes présent au sol semble peu probable car il n'existe pas de force connu capable de cela à une altitude aussi haute. L’espace devrait donc être la seule solution à cette présence microbienne. Des chercheurs allemands ont donc tenté de démontrer cette hypothèse. Ils ont testé la réaction des bactéries dans différentes conditions, mais seules les bactéries présentes dans des roches martiennes ont pu survivre aux conditions interplanétaires. Aucune bactérie n’a donc la capacité de survivre dans le vide spatial à moins qu’elle soit protégée. La NASA, a alors cherché la possibilité d’une provenance par l’intermédiaire de météorites. Pour cela, ils ont créé une météorite artificielle qui contenait des microfossiles et des microbes dont le but était d’observer leur réaction lors d’une entrée dans l’atmosphère. Après l’expédition, il s’est avéré que les fossiles ont été conservés mais les bactéries qui étaient pourtant à l’intérieur de la comète n’ont pas survécu à l’entrée dans l’atmosphère. Excepté certaines bactéries thermorésistantes, les organismes vivants ne peuvent donc pas être transportés dans les météorites. Les chercheurs sont quasiment sûrs qu’il y a bien eu de la vie sur Mars. Mais est-il possible que cette vie ait pu atteindre un jour la planète bleue et nous donner la vie.

         Récemment, les chercheurs ont trouvé un micro-organisme venant de l’espace : le tardigrade. Cet être vivant aux capacités d'adaptation extraordinaire dans le vide spatial serait donc capable de voyager dans l’espace et pourrait expliquer la théorie de la panspermie.
         Découvert au XVIIIe siècle, ce micro-organisme est aujourd'hui considéré comme un animal aquatique qui mesure environ 1,5 mm. On peut le trouver sur différents espaces de notre planète : les montagnes, le désert, les profondeurs maritimes, les zones de chaleur aux alentours des volcans mais également dans l'espace[7].

Tardigrade in Moss 
Nicole Ottawa & Oliver Meckes / Eye of Science / Science Source Images

Le tardigrade est donc un être suradapté capable de vivre de 20 mois à plusieurs dizaines d'années en alternant entre ''vie active '' et ''vie inactive''. En effet, il peut supporter des variations​ de températures allant jusqu'à 360°C pendant 30 minutes et 200°C pendant 2 ans[8]. Il peut également survivre au vide spatial ou à une pression hydrostatique égale à 6 fois celle existant à 10 000 mètres de profondeur océanique (soit 600 mégapascals). Ceci est anormal chez un organisme pluricellulaire, à une pression de 30 mégapascals, tout organisme vivant se désintègre obligatoirement jusqu’au niveau de l’ADN[8]. Il peut aussi vivre immergé dans l'alcool absolu ou le sulfure d'hydrogène. Sa capacité d'adaptation lui permet d'entrer en ''vie inactive'' pour survivre : s'il manque d'oxygène, il peut se gonfler d'eau et ainsi entrer en vie ralentie ou s’il n'y a plus d'humidité dans l'air, le tardigrade se dessèche et arrête son métabolisme, il entre dans un état proche de la mort, la cryptobiose. Certaines hypothèses​ amènent les scientifiques à penser que la vie peut être apportée sur une planète par des microorganismes​ venant de l'espace comme les tardigrades. Par leurs capacités de résistance dans les conditions difficiles, il est tout fait plausible que ces êtres vivants puissent survivre à un voyage spatial très long en cryptobiose accrochés à une météorite. En trouvant une région favorable à leur développement, ils seront peut-être aptes à ''revenir à la vie'' grâce à des phénomènes d'érosion et à un rétablissement du métabolisme. Cependant, la science actuelle ne peut pas encore répondre à toutes ces questions sur une telle adaptation.

         En conclusion, nous venons de voir différentes réponses des êtres vivants face aux conditions hostiles du milieu spatial. Ces réponses sont soit dues à un apport technologique pour l’homme soit dues à des systèmes complexes des êtres vivants comme les plantes ou les microorganismes. L’adaptation des êtres vivants dans l’espace est un processus long et difficile à observer qui engendre de nombreuses problématiques sur notre capacité à vivre hors de notre Terre.


Sitographie

[1] Les contraintes d’un voyage vers Mars <https://www.nirgal.net/homme2.html> (lu 23/05/2003)

[2] L’OBS (Jean-Paul Fritz) De la salade pousse dans l'espace : l'agriculture terrestre va profiter de l'expérience [en ligne] (11-08-2015,12-08-201 )   (lu 21 /04 /2017)

[3] RTL (Camille Kaelblen) NASA : la laitue romaine, premier légume cultivé dans l'espace [en ligne] (10/08/2015) (lu 21/04/2017)

[4] PLANET VIE (Agnès Lefranc) (28/02/2005). Le gravitropisme des végétaux < http://planet-vie.ens.fr/article/1521/gravitropisme-vegetaux> (lu 16/03/17).

[5] FUTURA SCIENCE Alex Kahn . (07/01/2003). Des micro-organisme à la frontière de l'espace. http://www.futura-sciences.com/sante/actualites/vie-micro-organismes-frontiere-espace-1505/ . (lu 12/03/2017)

[6] CNES . (03/10/2011). 2008 : des traces de vie dans une météorite pourraient résister à une entrée atmosphérique. https://sciences-techniques.cnes.fr/fr/web/CNES-fr/9576-st-2008-des-traces-de-vie-dans-une-meteorite-pourraient-resister-a-une-entree-atmospherique.php . (lu 14/03/2017)

[7] BIOLOGY (04/10/2015)Tardigrades: animals with superpowers

[8] ASTRONOO. Le tardigrade : ourson d’eau immortel. http://www.astronoo.com/fr/actualites/tardigrade.html (lu 01/05/2017)