Pesticides dans les aliments



COCLES Remy, FILLASTRE Thomas, NENY Marguerite, TOURE Dienabou, WENG Sabine


Le terme pesticide est basé sur le terme anglais « pest » qui signifie insecte ou animal nuisible et du suffixe « -cide » du latin « -cida » voulant dire « tuer ». Ils sont utilisés pour lutter contre les parasites animaux ou végétaux nuisibles aux cultures de façon à accroître le rendement de ces dernières. Les principaux sont les herbicides, insecticides et fongicides(1).

Pesticide ou « produit phytosanitaire » comme appelé dans la réglementation européenne, est le terme général utilisé pour désigner les substances ou les préparations utilisées pour la prévention, le contrôle ou l'élimination d'organismes jugés indésirables, que ce soit de plantes, d'animaux, de champignons ou de bactéries. On ne dénombre pas moins de 5.000 pesticides différents utilisés régulièrement en agriculture. Leurs usages excessifs leur ont conférés, depuis ces dernières années, une mauvaise réputation notamment du fait de leurs impacts sur l’environnement (impact négatif sur la biodiversité, pollution des sols,…) ou sur la santé des personnes consommant les produits [1].

On peut classer les pesticides par familles selon leurs cibles, ou leurs structures chimiques. Il existe 3 grandes familles de pesticides (classement par cibles) [2]:

   Les insecticides, ont pour cibles les insectes parasites, ils agissent en les tuant ou alors sur leur reproduction. Ils sont considérés comme les plus toxiques (DDT, Lindane)

   Les herbicides ciblent quant à eux les plantes parasites rentrant en compétition avec la culture et ralentissant leur croissance. Il s’agit de la famille la plus grande en termes de nombre de molécules synthétisées.

   Les fongicides ont pour cibles les moisissures et les parasites fongiques.

Si on les classe en fonction de leurs structures chimiques:
 
   les Organochlorés (Lindane, DDT):
 
   les Organophosphorés (Methamidophos):

   les Carbamates (Carbaryl, Carbofuran):

   les Organoazotés (Atrazine, Triadimefon):

   les Phénylurées (Diuron, Isoproturon):

   les Phtalimides (Captane):

   les Acides phénoxyalcanoïques (le MCPP)


D’une certaine façon les pesticides ont contribué à l’évolution de l’agriculture et de notre mode de vie mais avec le recul des années, on s’est rendu compte de leurs effets sur la santé et l’environnement. Ils affectent directement l’environnement, par exemple, en polluant l’eau et les sols, mais ils affectent aussi indirectement les consommateurs de produits souillés par les pesticides. En effet, de nombreux pesticides ont été déclarés cancérigène par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) ou alors responsable de troubles de la reproduction.

On peut alors se demander s’il n’existe pas une alternative aux pesticides ayant le même rendement mais surtout n’étant pas nocive pour l’environnement et pour la santé, notamment en remplaçant les pesticides actuels par des biopesticides.

Les pesticides de l'utilisation à la consommation

Les pesticides sont des produits phytosanitaires(en agricultures), des biocides ou des fertilisants utilisés par des professionnels ou des particuliers afin d'agir sur des organismes nuisibles, parasites ou jugés indésirables, de manière préventive ou de contrôle sur des objets ou plantations tels que les insectes, les champignons, les bactéries, les rongeurs ou plantes. Pour cela, le pesticide détruit, ou rend l’organisme inoffensif. [3]
Aujourd’hui, nous retrouvons les pesticides partout dans notre environnement : dans l’air, le sol, l’eau et les aliments. Il devient impossible de les éviter. De plus, les pesticides sont des produits chimiques capables de pénétrer dans notre organisme par différentes voies (orales, respiratoires ou cutanés)(3,4) provenant de l’environnement et en particulier par les aliments que nous ingérons. En effet, l’alimentation est la principale source d’exposition(3) et donc de pénétration des pesticides dans notre organisme.
Ces produits chimiques peuvent devenir un risque pour la société. Des réglementations d’utilisation ou de consommation de ces produits ont été mises en place afin de minimiser au maximum ces risques. En effet, chaque substance de pesticide à une valeur toxicologique dite de référence définies par l’OMS (organisation mondiale de la santé) à long terme : la DJA : dose journalière admissible que l’on peut ingérer toute la vie, quotidiennement sans risque pour la santé, et la ARfD : Acute reference dose, est une dose pouvant être ingérer pendant 24h sans risque pour la santé. Certaines réglementations prennent en compte l’exposition des individus face au produit. Par exemple, l’eau du robinet étant une source de dépendance et indispensable pour les individus, alors que 116 substances actives ont été trouvés dans les eaux souterraines en 2006, en France [3].
Mais les aliments sont également très suivis et régulièrement analysé par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) et par la DGAL (direction générale de l’alimentation), en particulier, les viandes, le lait, les œufs, les produits de pêche de d’élevages et les denrées végétales par la DGAL (direction générale de l’alimentation). Des limites maximales de résidus (LMR) ont été fixées pour chacun des pesticides et aucun aliment ne peut dépasser cette limite au risque d’être retiré du marché(5) pour minimiser l’ingestion de résidus. Par exemple, sur tous les produits alimentaires analysés en 2006, 6.0% étaient non conformes aux règles et avaient une concentration en résidus supérieur à ces limites maximales de résidus, qui était alors légèrement plus faible qu’en 2005 (6.7%) et qu’en 2007 qui est de 7.6% de non conformités. Cependant, ces chiffres restent un très faible pourcentage par rapport à la quantité d’aliments mis sur le marché. La limite maximale de résidus est donc généralement bien respectée. Cette réglementation permet de consommer chaque aliment sans risque pathologique.

Réglementation sur les pesticides :
La réglementation européenne concernant les pesticides est l’une des plus sévère du monde, elle est plus restrictive que les recommandations de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Cette sévérité permet notamment de préserver une marge et ainsi prévenir les effets nocifs de certains produits sur la santé, car d’autres substances chimiques (autres que les pesticides) peuvent être présentes dans les produits que nous consommons, comme des antibiotiques par exemple.
Cette réglementation concerne les aliments produits et importés en UE (donc en France). Elle permet de limiter les effets sur l’environnement et préserver la sécurité sanitaire vis-à-vis des consommateurs grâce aux LMR (Limite Maximale de Résidus de pesticide) [6,7]. Cette réglementation porte essentiellement sur les résidus des produits phytosanitaires. Elle permet ainsi de faciliter l’échange de produits alimentaires au sein de l’UE [8].
La réglementation régit la mise sur le marché des produits phytosanitaires et leur utilisation, chaque texte officiel possède un numéro et est rédigé en anglais. Il existe 4 grandes catégories de denrées : les fruits et légumes (texte numéro 76/895/CEE), les céréales (texte numéro 86/362/CEE), les produits d’origine animale (texte numéro 86/363/CEE) et les produits d’origine végétale (texte numéro 90/642/CE) [9] ainsi qu’une réglementation qui concerne les eaux.



Dans les ressources en eau
Au robinet du consommateur
2 µg/L pur chaque pesticide
0.10 µg/L pour chaque pesticide (à l’exception de l’aldrine, la dieldrine, l’heptachlore et de l’heptachloroépoxyde : 0.03 µg/L)
5 µg/L pour le total des substances mesurées
0.50 µg/L pour le total des substances mesurées

Tableau 1 : Règle générale concernant les produits phytosanitaires dans l’eau selon les règlements  n° 98/83/CE et 75/440/CEE


La réglementation repose sur le fait que les agriculteurs doivent utiliser le minimum de pesticides nécessaire à la production agricole. Pour les denrées alimentaires, le taux maximum de pesticides (LMR) est exprimé en mg/kg (mg de pesticides par kg de produit alimentaire). Ce taux est fixé en fonction de la catégorie de denrées alimentaires (fruits et légumes, viande etc.) est du produit concerné (carottes, pommes etc.) (6,7). Afin de préserver les aliments et les produits, les agriculteurs doivent respecter les Bonnes Pratiques Agricoles (BPA), d’après les directives du code national des bonnes pratiques agricoles (9,10). Ce code permet d’appliquer les directives européennes et ainsi garantir une homogénéité entre les différents pays.


Dégradation des pesticides en résidus

Une fois les pesticides appliqués sur une surface, ils  subissent des transformations appelées dégradations qui modifient la structure moléculaire du pesticide. Ainsi, lors du traitement d’une surface agricole par des pesticides, la quantité totale de pesticides pénétrant dans les aliments est nettement réduite par rapport à la quantité déposée. Cette dégradation peut être due à des éléments biotiques, c’est-à-dire, liée à l’activité d’êtres vivants présents dans le sol, l’air, l’eau ou les sédiments et en particulier les microorganismes tels que les bactéries, champignons, levures…Mais également par dégradations abiotiques notamment l’air, la lumière. Les rayonnements ultraviolets provoquent une photodécomposition, qui est la principale dégradation physique des pesticides. (21)
             
Comparaison des pesticides dans les aliments d’origine animale et végétale

Il a été constaté, grâce aux analyses de la DDCCRF fait sur 502 prélèvements en 2012, qu’aucun aliment d’origine animale n’avait un taux supérieur aux limites maximales de résidus (LMR) alors que les aliments végétaux tels que les fruits et légumes présentaient  plusieurs cas de non-conformité. En 2009, sur 3 482 échantillons, 3,6% des fruits et 3,5 % des légumes avaient une teneur en produits phytosanitaire supérieur à la LMR. En effet, de la même manière que la dégradation biotique, lorsque les animaux ingèrent des produits phytosanitaires, ces derniers dégradent une partie des pesticides en résidus par des réactions chimiques dans l’organisme ou les éliminent. Ce qui permet d’avoir une teneur en pesticides plus faible dans les produits d’origines animales comme la viande, ou le lait, par rapport aux produits d’origines végétales en particulier les poires, les raisins de table, les kiwis, les fraises et les ananas ainsi que les céleris , les petits pois, les épinards, les haricots et les légumes-racines qui sont les plus souvent en dépassement de la dose maximale.

Les effets des pesticides sur la santé et l’environnement
Les pesticides peuvent se répandre dans l'air, dans les aliments, ce qui est susceptible de toucher  divers êtres vivants, comme les animaux, les plantes, l'homme. Ils ont donc des conséquences pour la santé de l’homme et peuvent provoquer des dysfonctionnements dans notre organisme. Leur usage a aussi pour conséquences de dégrader l’environnement.


Les effets des pesticides sur la santé
Les pesticides sont à l’origine de deux types d’effet sur l’organisme : les effets aigus et les effets chroniques.

·           Les effets aigus : Les effets aigus sont des effets qui interviennent rapidement après une exposition à un pesticide. Les pesticides peuvent s’ancrer dans l'organisme par différentes voies, comme par la peau, par ingestion ou par les voies respiratoires et qui provoquerait des symptômes tels que des allergies de la peau ou des allergies oculaires, des vomissements, des problèmes respiratoires, de la fatigue, des étourdissements.(11)

·           Les effets chroniques : Ce sont des effets qui sont liés à une exposition à long terme. Ces effets touchent notamment les professionnels ou les agriculteurs, qui eux utilisent quotidiennement des pesticides, ce qui augmente les risques de développer la maladie de Parkinson, ou qui peuvent entrainer des cancers(1,2). Plusieurs études expérimentales ou épidémiologiques laissent supposer un risque plus important d’être atteint par certaines formes de cancer à la suite de l’exposition chronique à certains pesticides couramment utilisés. Les organismes internationaux responsables de l’évaluation du potentiel cancérigène, ont classé de nombreux pesticides comme probablement cancérigènes pour l’humain. Les types de cancer les plus souvent cités sont le cancer du cerveau, la maladie de Hodgkin et la leucémie.

Ils conduisent également à des problèmes neurologiques ou bien à des problèmes de reproduction chez les hommes. Les pesticides entraineraient à une malformation ou à une mauvaise croissance fœtale chez les femmes enceintes trop exposées aux pesticides. Ces derniers sont également à l’origine de problèmes dermatologiques, ce qui provoquerait des démangeaisons de la peau ou apparitions de rougeurs.

Quelques pesticides, notamment les insecticides sont également responsables d’effets neurologiques liés à une exposition chronique ou aigue. Ces effets peuvent durer parfois pendant des années, et sont responsables de difficultés psychologiques motrices ou neurologiques

Les effets des pesticides sur l’environnement

Les pesticides touchent de même l'environnement, car ils peuvent contaminer les eaux des rivières ou des lacs, les sols, l'air ou les plantes.

On distingue deux genres de pollutions par les pesticides :

·           La pollution diffuse : C’est une pollution qui est due à des rejets de substances polluantes dans l'espace à travers la dispersion de gouttelettes pendant l'application, ou l'échappement des pesticides des endroits traités. Les pesticides peuvent contaminer les sols voire même les nappes d'eaux souterraines. Cette pollution est à l’origine de diverses contaminations comme la contamination des végétaux, de l'eau potable, les cours d'eau et par la même occasion les poissons et d'autres êtres vivants(14).

·          La pollution localisée : C’est une pollution qui est due à des rejets de substances polluantes qui proviennent d'un seul endroit. Elle apparait lorsqu'on laisse dans la nature des contenants de pesticides vides qui n'ont pas été lavés, et sont dus aux déversements involontaires des pesticides lors de la préparation de celui-ci, ou le stockage des pesticides près d'un cours d'eau(14)


Une alternative aux pesticides classiques: les biopesticides

La composition des biopesticides
Les biopesticides, contrairement aux pesticides classiques, contiennent très peu de produits chimiques, et sont donc généralement moins toxiques et moins dangereux pour l’homme et pour l’environnement.

Fabriqués à partir de bactéries, de champignons, d’extraits de plantes, ou encore d’extraits animales, ils sont de plus en plus sollicités pour compléter, voire remplacer les pesticides classiques.

En agriculture biologique, les pesticides microbiens les plus utilisés sont les souches de Bacillus thuringiensis. Chaque souche de cette bactérie est présente dans la nature et peut être mortelle pour les chenilles, les mouches et les moustiques.

La pyréthrine est aussi très utilisée contre les chenilles et beaucoup d'autres insectes volants ou rampants. Ce biopesticide est issue des fleurs de chrysanthème.

Les avantages et inconvénients par rapport aux pesticides classiques
Les biopesticides sont efficaces en petite quantité et se décomposent en général rapidement. Au contraire des pesticides usuellement utilisés qui intoxiquent les ravageurs afin de les tuer, les biopesticides se contentent de les affamer, ou de renforcer l’immunité des plantes et des sols.

Cependant, ils ont quelques points négatifs: en effet, les biopesticides ont un prix très élevé comparé à celui des  pesticides classiques(15,16). De plus, les biopesticides peuvent être inefficaces si les conditions climatiques (ensoleillement, température, humidité) ou la composition du sol ne sont pas favorablesou encore si les ravageurs sont présents en grand nombre(15,16).


Conclusion

Les pesticides sont majoritairement utilisés par les agriculteurs, et se retrouvent dans notre environnement et dans notre organisme. L’exposition  à  ces molécules toxiques est actuellement  inévitable. Malgré leurs impacts négatifs, il faut signaler que les pesticides ont  contribué à la production d’aliments , du fait de leur efficacité contre les ravageurs qu’on pourrait retrouver dans les  aliments. Afin de réduire l’exposition aux pesticides, les organisations internationales mettent en œuvre des solutions pour limiter leur utilisation. En effet, le Grenelle de l’environnement a mis en place le projet «Ecophyto 2018» qui vise à réduire la consommation de pesticides de 50% d’ici 2018.

Ce projet mené par le Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt vise à sensibiliser les agriculteurs et ainsi à diminuer l’utilisation des pesticides, notamment par une formation à une utilisation modérée des pesticides: le certiphyto (certificat individuel produits phytopharmaceutiques).                       



Références



[3] ANSES - Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. http://www.anses.fr/fr/thematique/produits-phytosanitaires-biocides-et-fertilisants

[4] L’ORP- L’observatoire des résidus de pesticides. observatoire-pesticides.gouv.fr/index.php?papeid=259




[8] Observatoire des résidus de pesticides - http://www.observatoire-pesticides.gouv.fr/index.php?pageid=124

[9] Observatoire des résidus de pesticides - http://www.observatoire-pesticides.gouv.fr/index.php?pageid=302